Nicolas BOSCHETTI, Directeur des Systèmes d'Information et de l'Organisation / CIO
FONDATION VINCENT DE PAUL STRASBOURG
SIH Solutions : Quelle est votre propre vision des missions attribuées à un DSI d’établissement de santé ?
NB : Tout d’abord, l’alignement avec la stratégie de l’établissement, en la rendant possible grâce au déploiement de nouvelles solutions, est un enjeu majeur. Également, assurer un Système d’Information stable et sécurisé dans un environnement de plus en plus menaçant, demeure la figure imposée du DSI. Enfin, et c’est mon « fil rouge » : réduire les coûts, en inventant de nouvelles façons de travailler, en modernisant nos usages, et en se concentrant sur l’essentiel.
SIH Solutions : Pensez-vous que ces missions sont les mêmes qu’il y a 10 ans ?
NB : Le DSI vit une longue mutation depuis plusieurs années. Le principal axe de travail se situe dans la bascule d’un SI Support à un SI Métier. Le « service informatique » est devenu « la Direction des Systèmes d’Information » : un changement de vocabulaire qui est tout sauf anecdotique, puisque la DSI d’hier, autrefois cachée dans la salle serveur, se situe désormais au cœur de la gouvernance de l’établissement. Le DSI est maintenant attendu dans sa contribution à l’augmentation de la performance de l’hôpital.
SIH Solutions : De quels profils doit être composée une équipe SI en ES aujourd’hui ?
NB : Je conçois la DSI selon trois axes : le Support & Parc IT, les Études & Projets, et l’Infrastructure. Il s’agit donc de construire une équipe composée de compétences très différentes, tout en ayant à l’esprit que les échanges entre les pôles sont de plus en plus dynamiques, en mode agile, et dans un environnement en constante évolution, toujours plus exigeant, où la nouvelle génération d’utilisateurs devient elle-même une génération d' experts de l’informatique et du digital…
SIH Solutions : Pensez-vous que les besoins en compétence se sont modifiés ces dernières années ?
NB : Oui clairement. Aujourd’hui si les profils techniques sont toujours très recherchés, un nouveau type de collaborateur devient incontournable dans une DSI : le profil « consultant ». A l’aise à l’écrit et à l’oral, sachant mener des projets de transformation des organisations, il doit être avant tout adaptable, orienté « service » et je dirais même que l’absence de compétence purement informatique est une force ! Dans cette optique, recruter des profils issus d’école de commerce n’est plus rare. J’ajouterais qu’une compétence « Contrôle de Gestion » devient également un renfort apprécié, dans la démarche de construction de tableaux de bord pour les décideurs. Enfin, dans un avenir proche, les DSI devront se doter de compétences dans le domaine du marketing digital.
SIH Solutions : Pensez-vous que la principale problématique des DSI actuellement est d’avoir à régler les problèmes d’interopérabilité des SI hospitaliers ?
NB : C’est notre quotidien en effet. Nous nous heurtons à des solutions de DPI monolithiques, et particulièrement hermétiques. Elles ont mis des années à être acceptées par les utilisateurs et le montant colossal de la maintenance ne sert qu’à suivre les exigences règlementaires, il n’est consacré ni à la modernisation en profondeur de leur technologie, ni à l’ouverture aux autres ! Heureusement dans notre cas, bien que le Groupe Hospitalier soit constitué de 4 cliniques, le SIH est unique.
SIH Solutions : Êtes-vous plutôt « tout intégré » ou « multi-éditeurs » ?
NB : Plutôt multi-éditeurs, avec une carte de fidélité chez mon EAI préféré, Enovacom ?
SIH Solutions : Quels en sont les avantages/ inconvénients ?
NB : Le couteau suisse sait tout faire, mais il ne coupe pas très bien et son tournevis n’est pas adapté à toutes les situations…Dans un SIH c’est pareil, les usages sont tellement différents d’un service à un autre que le « tout intégré » montrera ses limites très rapidement et c’est l’ensemble de la solution qui perdra en crédibilité. D’un autre côté, le multi-éditeurs est très coûteux, y compris en maintenance des interfaces … C’est le prix de la souplesse.
SIH Solutions : Parmi les nombreuses offres de « digitalisation » qui fleurissent sur le marché aujourd’hui, lesquelles vous semblent le plus adaptées à une « simplification des parcours patient « ? (exemple :Modélisation, bornes interactives, services en ligne de prise de RDV ou d’admission, suivi post opératoire par des plateformes régionales…)
NB : En amont du parcours, les solutions de prise de rendez-vous en ligne sont désormais incontournables et ont largement montré leur intérêt. Désormais, il faut s’intéresser aux solutions qui proposent un véritable lien ininterrompu tout au long de la prise en charge, jusqu’au retour et maintien à domicile. C’est la fluidité de ce lien qui permettra d’améliorer la qualité de la prise en charge pour sécuriser le retour à domicile : en apportant de l’expertise ou de la télémédecine quand c’est nécessaire, de l’aide à domicile, et en intégrant le médecin traitant dans le processus. Ce lien constitue le prérequis indispensable à la réduction du temps d’hospitalisation. Nous n’avons pas encore fait de choix parmi les multiples plateformes qui se créent en ce moment, mais nous expérimenterons bientôt, c’est certain.
SIH Solutions : lesquelles, selon vous, pourraient faciliter la relation des praticiens ville-hôpital-ville ?
NB : A la Fondation, nous avons une activité médico-sociale importante avec notamment une dizaine d’EHPAD répartis dans le Grand Est. Nous sommes en train de déployer la solution de Télémédecine TokTokDoc depuis fin 2017. Les équipes sont enthousiastes de pouvoir enfin répondre à un besoin criant d’accès aux soins de spécialités et de réduction de déplacements. Aussi, dans le cadre de notre activité de prise en charge d’enfants (800 places d’accueil), nous menons une réflexion autour de la mise en place d’une connexion à une plateforme de consultation de pédiatres en ligne, pour enfin en finir avec les allers-retours aux urgences pour une angine !
SIH Solutions : Quels sont les 2 projets SI prioritaires dans votre établissement actuellement ?
NB : Nous travaillons à la fois sur le socle « métier support » avec l’amélioration des processus RH et Finances, et sur la poursuite des déploiements ciblant la dématérialisation des supports médicaux au sein du DPI.